ELIZABETH GRAVELINE, agr.
Conseillère en production laitière
Lactech inc
L’année 2021 a été un peu différente de 2019 et 2020. Depuis 2 ans, on observait une grande stabilité au niveau des performances alimentaires et productives des troupeaux Shur-Gain à travers la province. Les résultats technico-économiques 2021 annoncent de grandes perturbations de marché. Un cours résumé des résultats de groupe des 448 fermes ayant contribué à la collecte de données L-16 pour cette année.
Avant toute chose, qu’est-ce que la L-16?
La L-16 est un outil de calcul du résultat économique lié à l’alimentation du troupeau pour l’année complète sur votre ferme. Les données utilisées sont les ventes réelles de lait à la Fédération des Producteurs de lait et les achats réels de concentrés et de fourrages. Les fourrages et les grains produits à la ferme sont considérés à une valeur standardisée, c’est-à-dire, la valeur calculée par VIA Pôle d’expertise en services-conseils agricoles en début d’année. Le but étant d’avoir un portrait le plus précis possible de l’année qui est passée. De plus, précisons que ces données sont calculées sur le nombre moyen de vaches en lactation, et non sur le nombre moyen total de vaches dans l’étable.
Le portrait global
Sans grands changements depuis 3 ans, on compte en moyenne 101 kilos/jour de quota possédés pour 75 vaches en lactation. La ferme moyenne a produit 1,35 kg de gras par vache par jour. Une augmentation de 0,03 kg comparativement à 2020. Le prix brut du lait à l’hectolitre a atteint 82,05 $, un sommet depuis 2015.
Les faits notables
Malgré son augmentation constante depuis 3 ans, l’augmentation du prix du lait n’a pas empêché une diminution des marges. Non seulement le prix des intrants a commencé à augmenter après la première moitié de 2021, mais l’impact ne se trouve pas seulement au niveau des coûts de concentrés puisque les coûts production standards des fourrages ont été ajustés à la hausse eux aussi. Le résultat est clair : même avec des performances techniques légèrement à la hausse, la hausse du revenu laitier ne suffit pas à couvrir la hausse des taux de charges liés à l’achat d’intrants. On observe donc un recul sur la marge alimentaire par kilo de gras produits de 0,60 $. C’est une baisse de 4,5 % comparativement à 2020.
De plus, on observe encore cette année une forte corrélation positive entre la production de lait et de gras et la marge par vache annuelle. Le constat reste le même : c’est en produisant plus avec les mêmes charges que l’on dégage plus. Il est tout aussi important de contrôler la production que les coûts afin d’augmenter les marges.
Il ne faut jamais oublier que les marges dégagées sont, à la fin de l’année, le chiffre le plus important. Une bonne marge démontre que chaque dollar investi génère un bon retour sur l’investissement. Cela étant dit, on observe une préoccupante tendance au niveau de l’écart de la marge annuelle par vache entre le groupe de tête (20 % supérieur) et le groupe de queue (20 % inférieur). En effet, il y avait un écart moyen de 1 965 $/vache/an en 2014, mais cet écart se creuse à 2 347 $ en 2021.
Finalement, il n’y a toujours pas de lien entre le coût de concentrés/hl et les kilos de gras/vaches produits. En somme, ce n’est pas parce que le coût de concentrés/hl est plus haut qu’on produit plus ou moins de gras par vache par jour, l’inverse est aussi vrai. C’est pourquoi il est important de comparer les marges lorsqu’on veut évaluer l’impact d’un changement sur les résultats économiques. Il faut aussi considérer le coût des fourrages ; la proportion de ceux-ci dans vos rations affecte grandement le coût d’alimentation par vache par jour.
Quoi retenir ?
Il faut continuer à travailler sur l’efficacité dans l’étable afin d’augmenter les marges. Les prochaines années seront des années charnières ; il est important plus que jamais aujourd’hui de connaître ses coûts de production. Les prix sont des facteurs incontrôlables, mais la production, elle, est plus facile à travailler.
Miser sur la régie : Optimiser l’élevage en élevant moins et mieux, ne pas faire de compromis sur la phase de transition et début lactation, et porter une attention plus grande à la santé reproductive de votre troupeau.
Aller chercher le maximum des fourrages : Bien cibler le meilleur moment de la récolte, entreposer et reprendre le matériel adéquatement, et surtout, planifier l’année en fonction des stocks disponibles pour éviter tout imprévu qui pourrait perturber la santé ruminale des animaux. La constance, c’est la clef.
Contrôler le prix de nos grains au maximum : Consolider les prix des ingrédients les plus utilisés. Ils peuvent non seulement être fixes pour la livraison à la ferme mais aussi pour l’utilisation du grain dans la fabrication de vos produits vrac ! Exploitez les banques de grains mises à votre disposition afin d’utiliser votre propre récolte dans la fabrication de vos produits, c’est un outil essentiel et trop peu utilisé. Demandez à nos conseillers de vous accompagner dans ce processus ; ils ont tous les outils nécessaires pour vous aider.
En conclusion, prenez le temps d’évaluer votre situation actuelle et ciblez les points sur lesquels il vous est possible de travailler. Partager vos objectifs avec votre conseiller Lactech afin de bâtir le plan d’action approprié. Il faut garder en tête que l’alimentation n’est qu’une pièce du casse-tête et que bien d’autres facteurs sont considérés lorsque l’on parle économie en production laitière. Le but n’est pas d’investir au minimum, mais que chaque dollar investi génère un bon retour sur l’investissement.
