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LE BON FOURRAGE POUR LE BON GROUPE D’ANIMAUX

by Aryann Denis
Marcel Lévesque

MARCEL LÉVESQUE, T.P.
Conseiller principal technique ruminant
Lactech inc

Depuis 30 ans, les choses ont bien changé en ce qui concerne la qualité des fourrages récoltés dans les fermes laitières québécoises. À ma sortie de l’école en 1990, la révolution de ce temps-là était la valorisation des fourrages via leur qualité. Il fallait récolter les fourrages de première coupe plus jeunes au stade gonflement et non épiaison ainsi que réduire le nombre de jours entre les coupes afin de viser un fourrage ayant moins de 33 % de fibre détergente acide (ADF). Ajoutons à cela un renouvellement des prairies plus rapide afin de nourrir les laitières avec des fourrages d’une digestibilité accrue contenant moins de plantes indigènes. Le message a très bien été reçu et les fourrages ont beaucoup évolué. Prenons, par exemple, pour l’ensilage de maïs (Tableau 1), qui est passé d’une moyenne de 29,4 % de fibre ADF à 21 % sur cette période.  L’énergie aussi s’est amélioré grandement passant de 1,55 Mcal/kg à 1,75 Macl /kg. Et tout cela sans considérer les plus basses en fibre qui sont à 16 % ADF et qui ont une valeur énergétique à 1,85 Mcal/kg.

La situation est semblable pour les fourrages des vaches taries

Les choses ont tellement bien été faites que, maintenant, notre recommandation pour certains groupes d’animaux est de diluer ces fourrages avec de la paille car ils sont trop énergétiques. Au Tableau 2, nous voyons l’évolution des fourrages pour les vaches taries. Les fourrages sont passés d’une moyenne de 40 % ADF à une moyenne de 35,5 ADF en 2021. Cela a comme impact que l’énergie moyenne de ces fourrages est passée de 1,1 Mcal/kg à 1,30 Mcal/kg. Et cela avec des écarts très grands car certains fourrages contenaient seulement 30 % d’ADF et ont une valeur énergétique de 1,50 Mcal/kg. Cependant, le besoin des taries a très peu changé durant ces années. Même que plusieurs études nous ont confirmé qu’il est préférable que les taries ne prennent ou ne perdent pas de poids lors de cette période.

Pour les groupes des vaches taries ainsi que des génisses d’élevage, ces trop bons fourrages peuvent avoir des impacts négatifs.  Ces situations sont coûteuses pour les producteurs car elles entraînent des pertes de revenu ou des dépenses additionnelles. Pour les génisses d’élevage, ils peuvent générer des problèmes de reproduction si trop riches en protéine ou trop énergétiques. Et donc, retard d’entrée en production et saillies additionnelles pour la gestation. Pour les taries, ces fourrages peuvent entraîner une prise de poids qui se répercutera par des problèmes métaboliques en début de lactation. Acétonémie clinique et sub-clinique impacteront la production de lait, la reproduction des animaux ainsi que le taux de réforme. Le Tableau 3 nous présente ces données. La perte de lait est importante ainsi que le temps de traitement de ces animaux, mais à mon point de vue, le pourcentage de vaches qui seront éliminées est bien plus coûteux.

quelques solutions afin d’adresser la situation !

  • Fourrage de première coupe sur mesure pour ces groupes. Bien que plus difficile à faire pour la gestion des récoltes et des épandages de fumier, il est possible de retarder la coupe de quelques jours pour obtenir un fourrage adapté. Pour les génisses, un fourrage à 15-16 % de protéine et 30-34 % de fibre ADF sera suffisant pour combler les besoins sans excès. Pour les taries, il faut retarder encore de quelques jours pour viser un fourrage à 13 % de protéine et entre 36-38 % de fibre ADF. Ainsi, seulement avec ces fourrages, il ne manquera que le minéral approprié pour combler les besoins de ces deux groupes.
  • Du matériel pour diluer la ration peut être aussi utilisé. Je pense à du fourrage de 1re coupe récolté avec une maturité très avancée (40 % ADF et plus) ou tout simplement de la paille. Ici, par contre, il faut être en mesure de stocker correctement et de hacher de la longueur adéquate (1 pouce) afin d’éviter le tri de la ration. Cela nécessite de l’équipement et de la logistique afin de faire cette étape correctement.
    • L’utilisation de fourrages alternatifs peut aussi être une solution. Le seigle d’automne permet une récolte additionnelle lorsque semé après la récolte de maïs fourrager et s’intègre bien dans les rotations de cultures. Pour ce genre de fourrages, il est recommandé de récolter en ensilage humide court. Ainsi, il sera déjà prêt à être servi aux animaux sans autres interventions mécaniques de votre part. Toutes les céréales à paille avec des semis d’automne ou de printemps entrent dans cette catégorie et peuvent servir comme fourrage principal ou simplement pour diluer les rations selon le stade de récolte.
    • L’achat ou l’échange de fourrages peut également être une solution. Avez-vous déjà pensé à cette option? Un producteur que vous connaissez pourrait produire ce fourrage pour vous. Cela facilitera la gestion des récoltes et la gestion des cultures, tout en rencontrant les besoins des animaux.

En conclusion, plusieurs options s’offrent à vous et il s’agit de voir laquelle vous convient selon les volumes nécessaires ainsi que votre système d’alimentation afin d’améliorer la situation à la ferme. En résumé, je ne croyais assurément pas en début de carrière écrire encore sur le sujet des récoltes de fourrages et devoir adapter mon discours de cette façon. Avec les performances de production actuelles, ainsi que la situation du prix des intrants très élevé, la réussite des entreprises passera encore via la qualité des fourrages mais, cette fois-ci, en fonction de vos groupes d’animaux ainsi que de vos installations.

Bonnes récoltes à tous!

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