GABRIELLE TARDIF, M.Sc, agr.
Conseillère en production porcine
Agri-Marché inc
C’est après plus de 15 mois de négociations et de conciliations que le 18 avril dernier, les Éleveurs de porcs et les Acheteurs se sont entendus sur le renouvellement de la convention de mise en marché du porc 2023-2026. Cette nouvelle convention comprends entre autre la création d’un comité de travail permanent pour assurer une meilleure collaboration entre les différents partis, certaines particularités pour les porcs de niches, « certified humane » et porc biologique, afin de favoriser le développement de ces secteurs, mais surtout, des modifications au niveau de la non-conformité des carcasses à l’abattoir et une nouvelle formule de prix misant sur le partage des richesses et du risque du marché de la viande.
Prix du porc
Un autre élément important de la nouvelle convention concerne la nouvelle formule de prix. Dans l’ancienne convention, on avait un prix à l’indice 100 en $ CAN/100kg qui se basait sur le coût net moyen pondéré des porcs vendus par les producteurs aux États-Unis pour les catégories de formule de prix « negociated » et « swine or pork market formula » de l’avant-veille en $US/100lb. Toutefois, si ce coût net était en bas de 90% du prix de la carcasse reconstituée (cutout), le prix payé aux Éleveurs était de 90% du cutout américain. Si le coût net était supérieur au prix de la carcasse reconstituée, les Éleveurs étaient payés sur le prix à 100% de la carcasse reconstituée.
Dans la nouvelle formule de prix, le prix à l’indice 100 en $CAN/100kg est basé sur la valeur de la carcasse reconstituée (cutout) multiplié par un certain pourcentage selon la période préétablie. Les périodes et pourcentages sont les suivants :
Du 23 avril 2023 au 22 avril 2024 : 85,00%;
Du 23 avril au 22 juillet 2024 : 86,00%;
Du 23 juillet au 22 octobre 2024 : 86,50%;
Du 23 octobre 2024 au 22 janvier 2025 : 87,00%;
Du 23 janvier au 22 avril 2025 : 87,50%;
À compter du 23 avril 2025 : 88,00%;
De plus, dans la nouvelle convention, un complément de prix a été ajouté. Olymel devra fournir, au plus tard le dernier jour du mois de février de chaque année, une copie du rapport de mission d’attestation d’assurance limité, réalisé par un auditeur indépendant, présentant le bénéfice net par tête durant une période de référence de 12 mois.
Si le bénéfice net par tête est inférieur ou égal à 9$/porc, le complément de prix versé aux Éleveurs est de 0$. Si le bénéfice net par tête est entre 9$ et 15$ par tête, le complément de prix représentera le bénéfice net moins 9$/tête, multiplié par 50%. Le complément de prix pour cette tranche ne peut pas dépasser 3$/tête. Finalement, si le bénéfice net par tête est de plus de 15$/tête, le complément de prix correspond à 3$ plus le bénéfice net moins 15$/tête. Ce complément sera payable par chacun des Acheteurs aux Éleveurs au plus tard le 31 mars suivant la période de référence.
Cette nouvelle formule de prix représente entre 10 et 12$ de moins du 100kg/indice 100 pour la période du 23 avril 2023 au 22 avril 2024. Toutefois, on peut voir une certaine ouverture chez les Acheteurs de partager les bénéfices qu’ils feront dans les 3 prochaines années, ce qui n’avait jamais été vu auparavant et créera fort probablement un précédent pour les futures conventions.
Mise à jeun, tatouage et propreté des porcs
Dans l’ancienne convention, il avait été convenu qu’il y aurait des avis de non-conformité qui seraient émis pour des estomacs pleins (plus de 1400g) qui touchent plus de 10% des porcs, une absence de tatouage sur plus de 2% des porcs ou 50% des porcs envoyés sales, avec des croûtes sur une grande partie de la peau. Si une ferme obtenait un avis de non-conformité, celle-ci était convoquée à une rencontre avec l’Acheteur et les Éleveurs de porcs pour discuter de la problématique. La ferme obtenait ensuite un délai de grâce de 60 jours pour corriger le problème. Après ce délai, tout porc non conforme avait une déprime sur le prix selon des seuils préétablis. Une absence de tatou entraînait une déduction de 40% du prix, des estomacs pleins entraînaient une déduction du prix de 50% et des porcs sales, 30% de déduction du prix. Pour avoir un retour à la normale, il fallait que l’entreprise ait une moyenne mobile sur les 36 semaines suivant le délai de grâce inférieure ou égale à 0,3% de porcs avec absence de tatouage ou 1,5% de porcs avec estomacs pleins.
Ces avis de non-conformité se retrouvent également dans la nouvelle convention. La procédure de rencontre et de délai de grâce demeure la même. Par contre, les déprimes liées aux estomacs pleins lors d’une pénalité passent de 50% du prix à 25% du prix. De plus, les seuils de tolérance avant d’obtenir une déduction ont été augmentés, ce qui donne une petite chance aux éleveurs. Le tableau ci-dessous montre les seuils de la nouvelle convention.
Finalement, le délai de 36 semaines demeure fixe, peu importe la moyenne mobile des porcs envoyés sans tatouage ou avec estomacs pleins. Donc après 36 semaines, peu importe les absences de tatouage ou les estomacs pleins qui ont été envoyés, la ferme retourne à une situation régulière, et les seuils par défaut redeviennent ceux qui sont liés aux avis de non-conformité.
À noter qu’avec cette nouvelle convention, on ne s’attend pas à voir des coupures supplémentaires sur le prix comme ce qui a été vécu l’an passé. De plus, d’autres ententes ont été prises entre les Éleveurs et les Acheteurs pour s’assurer que la réduction de la production se fasse graduellement, dont une augmentation des assignations chez ASTA et CBCO ainsi que la poursuite de l’abattage de 624 000 porcs par Olymel des 1 105 000 porcs qui devaient être désassignés au 3 juin 2023.
Les temps sont durs présentement pour les producteurs de porcs, mais cette nouvelle convention laisse présager une meilleure collaboration entre les différents partis pour atteindre le même but commun, soit la rentabilité des entreprises agricoles et de transformations.