ROXANNE ROBERT, T.P.
Conseillère en production porcine
Agri-Marché inc
On s’entend pour dire que 2021 fût une année difficile au niveau SRRP au Québec! Plusieurs maternités ont été contaminées au SRRP et certaines ne l’avaient jamais été depuis les 25 dernières années! Ce virus frappe fort dans les maternités, mais quel est l’ampleur des dommages tout au long de la chaîne de production?
Prenons par exemple la Ferme A, qui a une capacité de 1800 truies et qui sèvre en moyenne 950 porcelets par semaine. Les premiers signes cliniques sont apparus au début de décembre 2020. Au début de la crise, les animaux ont été très affectés, à un point tel que 4 sevrages consécutifs ont été à zéro. Comparativement à la normale, la production a chuté de 34 %, ce qui représente un manque d’environ 18 000 porcelets. Si on monétarise le tout un peu, considérant qu’un porcelet de 6 kg s’est vendu en moyenne 52,83 $, cela équivaut à une perte d’environ 950 000 $ pour cette maternité, et ce, seulement au niveau des porcelets. Le vétérinaire a pris la décision de vacciner l’ensemble des truies au MLV, ce qui a engendré d’autres coûts en plus des traitements pour soulager les truies.
Par la suite, la mortalité s’est poursuivie en pouponnière. Quelques lots ont eu entre 15 % et 25 % de mortalité. Pour une pouponnière de 1000 places, cela veut dire entre 150 à 250 porcelets qui ne se rendront pas en engraissement. De plus, ces mêmes porcelets ont été démarrés sur les antibiotiques contrairement à la normale, ce qui augmente le coût de passage. Donc, sur les 35 000 porcelets sevrés, à 10 % de mortalité moyenne pour l’année, on compte un déficit de 3500 porcelets qui n’iront malheureusement pas en engraissement. On estime donc une perte d’environ 272 000 $ pour la pouponnière.
Finalement, au niveau des engraissements, cette partie se fait relativement bien. Nous remarquons un taux de mortalité plus élevé qu’à l’habitude et des performances réduites. Si la conversion alimentaire est augmentée de 0,1 pour 100 kg de gain, cela équivaut à 10 kg de moulée supplémentaire donc 4,66 $.
Qu’arrive t’il aux éleveurs lorsque près de 18 000 porcelets sont manquant dans leurs réseaux? Les bâtiments en post sevrage ne sont malheureusement pas remplis à pleine capacité ou laissés vides. Les animaux demandent plus d’attention et de travail pour le producteur. Cela cause des pertes monétaires car les frais fixes continuent malgré le manque d’animaux. On peut donc affirmer qu’une grosse crise de SRRP engendre des pertes tout au long de la chaîne de production.
Et les CLÉ dans tout ça?
C’est pour cette raison que les réseaux CLÉ (Contrôle Local et Éradication du SRRP) sont mis en place afin d’essayer de contrôler la propagation du virus en identifiant les bâtiments contaminés pour éviter le plus possible une dérive ou une nouvelle infection. Le modèle sur 3 sites amène les animaux à se déplacer sur plusieurs sites, ce qui dissémine encore plus rapidement et loin les souches. Il est donc important de bien protéger nos maternités car elles sont à la base de la santé de nos troupeaux. Nous ne pouvons pas empêcher le déplacement des animaux. C’est une roue qui doit continuer à tourner. Cependant, des solutions sont possibles.
À la suite d’une réunion CLÉ l’année dernière, nous avons réduit le risque d’une dérive grâce à la communication et à la bonne collaboration des producteurs. Un producteur naisseur-finisseur participant à la CLÉ exploite une maternité à moins de 3 km d’un site d’engraissement qui sera rempli sous peu par des porcelets porteurs d’une souche très virulente. Afin d’éviter le pire, un membre de la CLÉ a contacté les 2 producteurs et, ensemble, ils ont trouvé une solution. Cette solution n’était pas parfaite car elle comportait des pertes pour chacun d’eux. Le scénario était ceci : il y a eu échange de porcelets naïfs au producteur NF pour les envoyer dans un engraissement éloigné afin de protéger la maternité. De cette façon, chaque partie a trouvé son compte.
Finalement, une seule crise SRRP peut affecter beaucoup de gens donc n’hésitez pas à contacter vos CLÉ et vos voisins afin de trouver la meilleure solution qui sera profitable pour tous. Bien souvent, si chacun y met du sien, ce sera pour le bien commun.
