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L’IMPORTANCE DE TRAVAILLER EN HARMONIE

by Josianne Bouchard
3 min.
PORC_Photo auteur_Nancy Franco-Gendron nb carrée

NANCY FRANCO-GENDRON
M. Sc. agr.
Conseillère en production porcine
Agri-Marché inc

PORC_Photo Auteur_Valerie Sauvageau-Robert carré (réduit)

VALÉRIE SAUVAGEAU-ROBERT, T.P.
Conseillère en production porcine
Agri-Marché inc

Depuis quelques années, les producteurs de porcs investissent beaucoup de temps et d’argent dans l’amélioration de la santé et du bien-être des troupeaux. Toutefois, contrairement à la croyance populaire, il n’y a pas que le statut sanitaire qui soit un défi d’envergure en production porcine. Les éleveurs de chaque stade de production doivent tous faire face à des défis particuliers. Mais bien qu’ils aient des réalités différentes, ils ont un seul et unique but en commun : produire un cochon en santé et de bonne qualité, ce qui repose sur les performances et la rigueur du travail effectué en maternité.

À la maternité, on veut avoir le plus de porcelets sevrés par truie par année pour avoir une entreprise en bonne santé financière. Par contre, la qualité de l’animal sevré a un gros impact pour les prochains stades de production. L’industrie porcine produit des porcelets de 6,5 kg à 21 jours d’âge. Cependant, pour parvenir à une moyenne se rapprochant de ce poids, beaucoup de travail doit être fait. Tout cela commence par la prise du colostrum.

LE COLOSTRUM

Le colostrum est le premier lait qui est produit tout juste après la mise-bas et sa qualité diminue considérablement en quelques heures. Le colostrum contient des éléments très nutritifs ainsi que des immunoglobulines qui favorisent la santé du nouveau-né et le développement de son système immunitaire. La prise du colostrum produit par la mère biologique par le porcelet doit être maximisée dès les premières 6 heures de vie, car l’efficacité de l’absorption des immunoglobulines est grandement réduite par la suite. Pour favoriser une bonne santé et un bon poids au sevrage, il faut s’assurer qu’un porcelet boive un minimum de 100 ml de colostrum par kilogramme de son poids à la naissance.

Par exemple, si un porcelet pèse 1,45 kg à la naissance, il devrait boire un minimum de 145 ml de colostrum. Selon le guide de Hypor, on suggère un minimum de 250 g par porcelet en allaitement, en alternance s’il y a plus de porcelets que de tétines fonctionnelles sur la mère. On peut former 2 groupes et faire des changements par rotation à toutes les 30 ou 45 minutes. Ceci aide les petits porcelets ou les nouveau-nés à prendre le colostrum.

Les porcelets dont la prise alimentaire est déficiente dès le départ auront tendance à avoir un gain de poids vif quotidien inférieur à la moyenne. Pour assurer une bonne prise de colostrum, il faut installer le nouveau-né très près de sa mère ou sur l’une des tétines de cette dernière pour l’encourager à boire.

Tout en effectuant la surveillance des naissances et de la prise alimentaire, il est fortement conseillé d’assécher les porcelets naissants. L’assèchement permet aux porcelets de concentrer leur énergie sur leur désir d’aller boire plutôt que de se réchauffer. Au besoin, on peut porter assistance aux porcelets qui ont de la difficulté à boire ou les gaver avec une seringue de colostrum. Aussi, il est important de s’assurer de laisser les meilleures tétines aux porcelets les plus vulnérables, mais il faut mettre son énergie sur les porcelets les plus viables. Il est recommandé que le poids à la naissance soit minimalement de 700 g pour optimiser la performance.

L’ADOPTION

Il est conseillé de procéder aux adoptions au cours des 24 premières heures de vie. Par contre, le transfert doit être fait après la prise de colostrum, car il est préférable que ce dernier provienne de la mère biologique. Pour effectuer les adoptions, il faut compter les tétines fonctionnelles de la femelle. Cette étape permet de voir si le nombre de cochons est supérieur au nombre de tétines et de connaître les places disponibles pour de futures adoptions. Cela étant dit, les deux dernières tétines comptent pour une seule. En maximisant chacune des tétines, cela permet par ailleurs, surtout chez les cochettes, d’obtenir un meilleur développement mammaire et par le fait même d’avoir de meilleures lactations dans le futur.

En effectuant le transfert des porcelets, il faut donner les petits des cochettes seulement à d’autres cochettes. Aussi, lorsqu’une portée est en surnombre, on doit donner les plus gros cochons aux plus petites portées; ainsi, la hiérarchie de la nouvelle portée se fait plus facilement. Il est important aussi de toujours maximiser le nombre de porcelets par tétine fonctionnelle sur les cochettes. On veut stimuler toutes les tétines pour optimiser la lactation pour les portées futures. Au besoin, on peut sevrer une plus vieille truie pour augmenter le nombre de porcelets destinés aux cochettes qui n’ont pas mis bas suffisamment de porcelets pour stimuler leur système mammaire.

L’important dans cette procédure est de ne pas dépasser les 24 heures de vie, car cela diminue le risque d’écrasement des porcelets et augmente leurs chances de survie. De plus, il ne faut pas mélanger trop de porcelets de différentes portées en tentant de les équilibrer, car ceci augmenterait le risque de transfert de maladies entre elles. En ayant de bons protocoles d’adoption, vous améliorerez les chances d’obtenir de belles portées, et ce, jusqu’au sevrage.

SOINS ET MANIPULATION DES PORCELETS

Il y a bel et bien un amalgame de soins nécessaires pour mener les petits vers le sevrage. Certains d’entre eux peuvent paraître anodins, mais la plupart permettent de faciliter la tâche aux éleveurs qui poursuivront l’élevage au-delà du sevrage. Ces manipulations commencent même avant que les porcelets viennent au monde.

Lors de l’assistance aux mises-bas, il est important de faire attention à la méthode de fouille. Lorsqu’un employé aide à l’expulsion d’un porcelet, il est fortement conseillé de tirer sur le bout du cordon ombilical qui se trouve encore dans la truie au lieu de tirer sur le porcelet. Cela évite de rompre le cordon au niveau du nombril et diminue les risques d’hémorragie, d’infection ou d’apparition d’une hernie plus tard dans la croissance. La coupe du cordon ombilical lorsqu’il est sec est également recommandée pour les mêmes raisons.

L’étape de la castration doit être effectuée soigneusement pour éviter les risques de hernie scrotale, ce qui peut aussi apparaître plus tard dans l’élevage. Certains mâles présentent seulement un testicule en bas âge; si le deuxième n’apparaît pas à la fin de la période de lactation, il est préférable que l’animal ne soit pas déplacé en pouponnière. Il pourrait y avoir des démérites à l’abattoir s’il était logé dans l’animal. En d’autres mots, les producteurs en engraissement essuieraient une perte financière considérable d’avoir nourri un animal sans en avoir un juste prix en retour. Pendant la castration, il y a également l’ablation de la queue; la portion restante devra avoir une bonne longueur, ni trop longue, ni trop courte. Il faut viser une longueur de 14 mm à 1 cm. Cette pratique a pour but de diminuer la caudophagie en pouponnière et en engraissement. Il ne faut pas oublier que le porc est un animal très curieux et que par nature, il grignotera tout ce qui dépasse.

Quelques jours après la naissance, on doit faire preuve d’observation et s’assurer que les porcelets ont une bonne croissance et une bonne santé. Lorsqu’il y a présence d’épidermatite, communément appelée gale, il faut intervenir rapidement pour ne pas que le tout dégénère en pouponnière quand les petits seront tous mis ensemble. Aussi, il faut contrôler l’apparition de diarrhée sous les mères, car cela peut avoir un effet sur le poids moyen ciblé et donc sur le reste de l’élevage après le sevrage.

Pour préparer les porcelets à un changement éventuel d’alimentation, il est conseillé de leur donner de la moulée cinq jours avant le sevrage. Cette étape leur permet d’avoir le réflexe de consommer un aliment sec et solide et les aide à développer leur système digestif. Pour finir, on procède à la sélection des porcelets sous les mères. Les éleveurs veulent des porcelets en pouponnière actifs et ronds, sans hernies et qui marchent sur leurs quatre pattes.

ENVIRONNEMENT

Afin de diminuer l’incidence de maladies dans chaque bande, il est primordial de fournir aux animaux un environnement propre. Ceci inclut le lavage des chambres de mise-bas, des corridors et des espaces réservés à la gestation. Pour faire un bon lavage et être le plus efficace possible, il faut commencer par préparer les chambres. On doit retirer toutes les trémies ou le matériel qui doivent être nettoyés avec plus de précision. Il faut ensuite enlever manuellement la matière organique comme le fumier. Il ne faut pas oublier de dépoussiérer les ventilateurs et les trappes d’air puisqu’eux aussi contiennent des résidus contaminés. Dès que ceux-ci sont enlevés, on peut passer au trempage des surfaces et par la suite au rinçage à haute pression de haut en bas. Ceci fait en sorte qu’il n’y ait plus de matière organique sur les surfaces pour que les produits utilisés puissent agir en vue d’enlever les biofilms. Lorsque cela est fait, on applique un savon (ex. : Adhere CPM) du bas vers le haut et on le laisse agir pendant environ 20 minutes, pour ensuite rincer à haute pression.

Avant de désinfecter la salle, il faut inspecter les lieux pour s’assurer qu’il ne reste plus aucun résidu qui pourrait contaminer les nouvelles truies. Par la suite, on peut procéder à l’étape de la désinfection de toutes les surfaces du bas vers le haut à l’aide d’un mousseur.

Pour terminer, on doit rapidement sécher les salles à l’aide de ventilateurs et de chauffage avant l’entrée des animaux. Il ne doit plus rester d’eau ou de désinfectant dans les trémies. Les restants d’eau pourraient rendre les déplacements des truies dangereux à cause des risques de glissade, sans compter que l’eau est un vecteur potentiel pour le développement de pathogènes.

Pour favoriser le confort des porcelets lors des mises-bas, il faut s’assurer que la température de la chambre se situe entre 74 et 75 ºF. De plus, il est important de préparer les salles de mise-bas en s’assurant que les tapis et globes soient fonctionnels et en mesure de fournir une bonne température aux porcelets. Faites la vérification à l’aide d’un thermomètre infrarouge et visez une température de 85 à 93 ºF pour les petits. Lorsque les mises-bas sont terminées, on peut graduellement réduire la température sur une période de 7 jours jusqu’à ce qu’une température ambiante de 68 ºF soit atteinte. Il est aussi fortement recommandé que les globes et tapis chauffants soient allumés pour le confort des porcelets.

Un bon réglage de la température dans les chambres de mise-bas est essentiel pour le bien-être des truies et des porcelets. Il favorisera la prise alimentaire de la truie, ce qui augmentera sa production de lait pour les petits. Les globes et le tapis chauffants augmentent aussi le confort des porcelets, ce qui les stimulera à aller prendre le colostrum et à boire plus de lait. De plus, ils se trouvent à contrôler un peu les mouvements des porcelets, ce qui diminue les risques d’écrasement.

IMPACT D’UN BON TRAVAIL EN MATERNITÉ VERS LA FIN DE LA CHAÎNE

Tout bien considéré, lorsque tous les efforts sont mis en maternité, le reste de la production en bénéficie. Grâce à une bonne prise de colostrum, on peut facilement avoir un meilleur poids au sevrage, ce qui augmente la performance du porc en pouponnière et en engraissement. Plusieurs recherches ont démontré qu’un poids plus lourd au sevrage raccourcit la durée de l’élevage en engraissement. Les porcs en engraissement peuvent parvenir à un poids de 125 kg vivant 8 à 15 jours plus rapidement avec un poids moyen au sevrage au-delà de 5,5 kg (Cabrera et al., 2010 et Mahan et Lepine, 1991). De plus, l’étude de Cabrera et al. a prouvé qu’il y a une relation linéaire entre le poids moyen au sevrage et le gain moyen quotidien des porcs en pouponnière. Ces chercheurs ont aussi conclu que la plus grosse perte en production était liée aux porcelets dont le poids était inférieur de 5 kg au sevrage.

Pour ce qui est de la castration, de la manipulation des porcelets et des injections, elles influencent grandement l’incidence de codes 67 (semi-castrat), de hernies ombilicales ou scrotales et d’abcès qui apparaîtront sur les porcs en pouponnière et en engraissement. Une castration faite trop rapidement augmente les risques de hernie scrotale et d’un code 67 à l’abattoir. Ce code mène à une grosse perte monétaire. Par exemple, si le prix du porc se trouve à 1,80 $/kg et que la carcasse est de 104 kg, la perte sera de 80 $ par porc. Par ailleurs, à cause des normes de plus en plus strictes en matière de bien-être des animaux, plusieurs porcs ayant des hernies ne peuvent plus être envoyés à l’abattoir puisqu’ils sont considérés trop fragilisés pour être transportés. Ceci représente encore des pertes pour les producteurs en pouponnière et en engraissement, car ces porcs ont consommé de la moulée et ne pourront pas être valorisés.

Ce qu’il faut retenir, c’est qu’en travaillant en harmonie en tant que producteurs de porcs, le succès de tous peut être grandement amélioré !

Références

Cabrera, R.A., Boyd,R.D., Jungst, S.B., Wilson, E.R.,  Johnston, M.E., Vignes et J.L., Odle, J. Impact of lactation length and piglet weaning weight on longterm
growth and viability of progeny. Journal of Animal Science, vol. 88, no 7, juillet 2010, pp. 2265-2276 https://doi.org/10.2527/jas.2009-2121

Mahan D.C. et Lepine, A.J. Effect of pig weaning weight and associated nursery feeding programs on subsequent performance to 105 kilograms body weight. Journal of Animal Science, vol. 69, no 4, avril 1991, pp. 1370-1378.

Hypor. Gestion de la mise-bas pour la Hypor Libra :
Gestion du jeune porcelet. www.hypor.com

Muirhead, M.R., Alexandre., J.L., et Carr, J. Managing
Pig Health: A Reference for the Farm. 2e edition, 2013.

Nanji Deshmukh Veterinary Science University (NDVSU). Care and Management of Piglets from Birth to Weaning. http://www.ndvsu.org/images/ StudyMaterials/LPM/Care–management-of- Piglets.pdf

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